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Les mystères de la momie noire de Uan Muhugiag

Que s'est-il passé dans la région de l'Acacus au coeur des déserts libyens il y a environ 5400 ans ? Qui était donc l'enfant de Uan Muhugiag ?

Qui était sa famille et son peuple ? Où sont-ils partis ? Quels liens ont-ils avec l'émergence des cultures préhistoires du Nil, avec les premiers « Égyptiens » ? La momie noire n’a pas fini de poser des questions et les archéologues cherchent toujours les réponses. Et si les peuples de Uan Muhugiag étaient à l’origine de la civilisation égyptienne…

 

 

 

Texte de François Tonic (paru dans pharaon magazine n°2)

Les montagnes d’Acacus (ou Tadrart Acacus) sont situées à l’est de la ville de Ghat, à une centaine de kilomètres de la frontière algérienne. Cette région possède un patrimoine préhistorique exceptionnel, depuis 1985 classé par l’Unesco. Les premières traces d’occupation humaine remonteraient aux alentours de 12 000 ans avant notre ère.

Une découverture extraordinaire

C’est en 1958 que l’Italien Fabrizio Mori va découvrir l’abri rocheux de Uan Muhugiag dans la région de l’Acacus. Dans cet abri, une accumulation de plusieurs siècles constitue le sol. Et dans une légère cavité, se trouve une sorte de sac soigneusement positionné. L’ouverture de l’objet fut une surprise pour l’équipe italienne : le corps en position fœtale de ce qui ressemble à un enfant. L’étude réalisée à Rome semble être sans appel : le corps de l’enfant semble indiquer les traces d’une momification artificielle (à l’instar des Égyptiens). Donc, le mort a été traité par son peuple pour que le corps ne pourrisse pas. Les chercheurs ont parlé d’une éviscération, c’est-à-dire que les organes internes furent retirés. Et la peau, ou le corps en lui-même, aurait reçu un traitement spécifique pour préserver la peau.

Si les traces de momification semblent incontestables, reste à découvrir le mode opératoire. Sur ce point, un grand flou existe. Et la technique même de momification n’est pas certaine, hormis pour le retrait des organes. La présence de végétaux sur le corps (et à l’intérieur ?) pourrait indiquer que Uan Muhugiag fut « momifié », du moins partiellement, par le dépôt de plantes.

Une énigme chronologique et la chronologie croisée avec la momification en Égypte

Un des problèmes soulevés par la momie de Uan Muhugiag concerne sa datation. Les dernières estimations au Carbone 14 indiqueraient 5400 ans, soit une date aux alentours de 3400 av. J.-C., avec une marge d’erreur de +/- 180 à 200 ans. Il est en effet très difficile de dater précisément des éléments aussi anciens car de nombreux facteurs environnementaux faussent les analyses. D’autre part, l’abri de Uan Muhugiag n’a pas permis une plus grande précision. Uan Muhugiag pose un double problème aux égyptologues : en admettant une date aussi ancienne, Uan Muhugiag constitue la première véritable momie ayant eu un traitement non naturel (extraction d’organes, traitement de la peau ?).

En Égypte, les premières traces de momification naturelle s’observent aux alentours de 3600-3400 av. J.-C., soit une date contemporaine à Uan Muhugiag. Par contre, la vraie momification apparaîtra visiblement plusieurs siècles après, pas avant la 2e dynastie (débutant vers 3000-2900 av. J.-C.). Cependant, ces premières momies montrent déjà l’usage de bandelettes entourant le corps et l’usage de minéraux de natron pour assécher le corps. Cela montre déjà une technique relativement avancée de la momification, nous sommes là techniquement plus « modernes » que Uan Muhugiag. Reste à déterminer quand apparaissent les formes primitives de momification comme l’éviscération ou l’usage de substances. Aujourd’hui, l’archéologie peine à trouver des réponses, faute de cimetières aussi anciens, faute de tombes intactes. Peut-être des traces existent-elles à la fin de la 1re dynastie, mais il nous manque les origines.

Sans doute faut-il chercher durant la dynastie 0 (3300-3150 av. J.-C.) les tout premiers traitements partiels, artificiels des corps. Cela demeure une hypothèse car nous n’avons aucune trace archéologique. À notre connaissance, les fouilles dans les nécropoles royales de Umm el-Qaab en Abydos n’ont pas révélé de tels corps, ni dans des cimetières plus anciens comme à Tarkhan, Merimde, Badarie, etc.

Quoi qu’il en soit, il faut bel et bien considérer Uan Muhugiag comme la première momie ayant subi un traitement artificiel. Notons cependant que cette momification reste rudimentaire. S’il y a bien éviscération, pour le reste, les chercheurs n’ont pas (à notre connaissance) découvert d’éléments décisifs. Le corps fut-il rempli de végétaux ? La peau, partiellement préservée, fut-elle traitée avec un « produit » ? Difficile de répondre. Si l’enveloppe qui contenait le corps fut effectivement remplie de végétaux, pour le cadavre cela reste à vérifier. Et à l’époque de l’enfant de Uan Muhugiag, le climat de l’Acacus était encore humide, même si une désertification s’intensifiait. Or, en environnement humide, ou plutôt non désertique, difficile de conserver un corps sans traitement, excepté dans des environnements très spécifiques.

Notons tout de même qu’à l’époque de Uan Muhugiag, le climat était sans doute déjà semi-désertique ou tout le moins de savane. Et il semblerait que l’aridité de l’environnement s’enclencha dès 7000-6500 av. J.-C.

Uan Muhugiag demeure unique !

Cet enfant nous pose une question cruciale : qui était-il, qui était la population vivant à Uan Muhugiag ? Le problème est que Uan Muhugiag est unique dans l’Acacus malgré de nouvelles découvertes de restes humains. Une jeune femme datant des 3e-2e siècle av. J.-C. fut découverte au début des années 1990.

Ce que nous savons, d’après les études réalisées sur la momie, c’est que la population de Uan Muhugiag était noire. Elle venait peut-être du centre de l’Afrique, et pour une raison inconnue, migra peut-être un peu plus au nord, dans la vaste de région de l’Acacus. L’archéologie, depuis 50 ans, a trouvé de nombreux indices sur cette population, qui confirment l’étonnante découverte. Cette population noire était jusqu’à Uan Muhugiag totalement inconnue ainsi que la culture de Uan Muhugiag.

De la population de l’abri de Uan Muhugiag nous ne savons pas grand-chose hormis son alimentation, ses outils. Sans doute plusieurs familles vivaient ici, soit plusieurs dizaines de personnes. Mais cela n’explique pas le cas si particulier de la momie noire. La momification était-elle courante à Uan Muhugiag ? Impossible de le savoir ! Car c’est le seul exemple connu malgré 50 ans de fouilles. La momification avait-elle une signification religieuse ? Une vie après la mort ? Là encore, impossible de répondre. Il faut des points de comparaison.

Quand le Sahara était verdoyant…

Hormis ces éléments, nous ne connaissons rien de cette populaire qui était peut-être semi-nomade, qui vivait de la pêche, chasse, et peut-être d’une agriculture rudimentaire. Les peintures et gravures sur les parois rocheuses montrent clairement la présence d’un bétail (bovins, chèvres). Cela prouve une présence d’eau, et l’archéologie a prouvé la présence de grands lacs dans cette région. 

Conclusion

Pourquoi cet enfant fut-il momifié ? Par qui ? Par quelle tradition ? Nous ne savons pas ! Il semble que la population de Uan Muhugiag se déplaça vers l’est (en direction de la vallée du Nil ?) afin d’échapper à la désertification de plus en plus forte, au manque d’eau. Mais la culture de Uan Muhugiag nous échappe totalement. Nous ne savons pas quand elle apparaît, ni quand elle disparaît. Quoi qu’il en soit, une des clés de la civilisation d’Afrique du Nord se situe à l’Acacus même si nous maîtrisons encore mal la chronologie et l’évolution des populations. Il faudrait surtout comprendre où la culture de Uan Muhugiag a migré, si elle n’a pas tout simplement disparu avec la végétation.

Cette momie noire, unique, pose des questions insolubles, faute de pouvoir la comparer avec d’autres momies de Uan Muhugiag ou de l’Acacus. Il faut se garder de toute conclusion sensationnelle et être d’une très grande prudence…

Pour aller plus loin

Collectif, The first Africans, Cambridge, 2008.

Graeme Barker, The agricultural Revolution in Prehistory, Oxford, 2006.

Documentaire télévisé : Le mystère de la momie noire 

Site internet officiel de la mission italo-libyenne d’Acacus et du Messak : http://www.acacus.it/eng/index.htm

 

Commentaires

Sachant que la libye était

Sachant que la libye était peuplé de bérbéres dans des temps immemoriaux et que l'actuel égypte

était peuplé en grande partie de bérbére aussi ,les liens entre les civilisations Egyptiennes et Libyennes (Bérbére) ne sont plus a démontrer. Sans doute une piste a étudier

 

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